La grande salle du Théâtre Saint-James a accueilli le 28 mai 2018 la 6e édition des Grands Prix Mosaïque de la diversité culturelle au Québec.
L’évènement s’est déroulé autour du thème : « Vivre-ensemble en paix », une thématique qui allie à la fois diversité culturelle, société d’accueil et intégration des immigrants. Le tout, avec comme toile de fond la réussite des immigrants en terre d’accueil. L’objectif, selon les organisateurs, est d’inciter les immigrants à viser l’excellence dans tout ce qu’ils entreprennent. Il s’agit aussi de récompenser des personnalités du Québec et d’ailleurs qui agissent, de manière exemplaire, comme des ardents défenseurs de la diversité, du vivre-ensemble, de l’environnement et du développement durable. Le gala, indiquent-ils, répond également à un énorme besoin de reconnaissance des succès de la communauté immigrante.
Selon le décompte des organisateurs, plus de 300 personnes venant des cinq continents avaient fait participé au gala. L’assistance était composée d’hommes d’affaires, d’universitaires, d’artistes et des invités d’horizons divers. On remarquait également des élus (ou leurs représentants) fédéraux, provinciaux, municipaux ainsi que des représentants de formations politiques.
Les lauréats des Grands Prix Mosaïque de la diversité culturelle se sont vu attribuer des « Lys de la diversité ». Les deux plus prestigieux Lys internationaux ont été décernés au Cheickh Khaled Bentounes de l’Algérie et à Me Emmanuel Moulin de la France. Le premier est considéré comme le parrain de la «Journée internationale du vivre-ensemble en paix» adoptée à l’unanimité par l’Organisation des Nations unies (ONU) le 8 décembre 2017 alors que le second est le cofondateur et président du réseau international ABL regroupant plus de 50 cabinets d’avocats dans le monde.
Cheickh Khaled Bentounes est considéré comme une icône par beaucoup d’Africains, particulièrement les Magrébins. Ses prises de parole ont été chaleureusement applaudies lors de la cérémonie. Évidemment, la communauté arabophone avait fait le déplacement en grand nombre. Cheickh Bentounes a déjà été décoré du grade de Chevalier de l’Ordre national du Mérite par le palais de l’Élysée en France. Il caresse le rêve de voir des milliards d’humains qui peuplent la planète envisager leur avenir collectif «les uns avec les autres et non les uns contre les autres».
Tout en saluant l’apport du Québec et de Montréal dans le processus du vivre-ensemble, Cheikh Bentounes estime que la société canadienne a fait « un pas d’avance sur beaucoup de pays» dans le monde en termes de vivre-ensemble. Il en a profité pour féliciter le leadership de Montréal, l’unique ville de la planète, a-t-il soutenu, disposant d’un Observatoire des maires sur le vivre-ensemble. Cet organisme est présidé par l’ex-ambassadeur du Canada (USA, France), Raymond Chrétien, le cousin de l’ex-Premier ministre du Canada, Jean Chrétien. De son côté, Me Emmanuel Moulin est reconnu comme un défenseur de la responsabilité sociale des entreprises et du développement durable.
La ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Christine St-Pierre, a assisté à toute la cérémonie. Elle a fait valoir l’importance de la diversité pour le Québec qui, dit-elle, est au carrefour de nombreuses influences culturelles grâce à son ouverture sur le monde, sa diversité et ses liens internationaux établis au fil des ans. « Le vivre-ensemble est de nature à renforcer la cohésion des sociétés autour des valeurs de démocratie et de justice, d’égalité entre les hommes et les femmes, d’éducation aux droits et libertés et la mise en place de stratégies d’inclusion et de tolérance », a-t-elle indiqué.
Les neuf lauréats des Lys du Québec sont répartis dans les catégories suivantes : médias, arts et culture, affaires, politique, régions et hors-Québec, engagement social ou communautaire, relève, grand Prix bâtisseur et grand Prix hommage. Médiamosaïque a également fait la présentation du « Top 20 de la diversité » avec deux figures d’origine haïtienne : Bruny Surin, natif du Cap-Haïtien, médaille d’or olympique d’athlétisme et maintenant entrepreneur québécois ainsi que Jean Ernest Pierre, PD-G de la première station de radio de la communauté haïtienne de Montréal.
L’autre point fort de la soirée a été le Lys média attribué au journaliste québécois de Radio-Canada, Pascal Robidas. Il est le seul visage asiatique de Radio-Canada. Cette récompense vise à célébrer une « œuvre médiatique mettant l’accent sur la dimension humaine et sociale d’une situation […] favorisant l’inclusion de la diversité sous toutes ses formes ». Elle a été décernée à Pascal Robidas pour son reportage sur Minh-Tri Truong, ancien « boat people » viétnamien devenu commandant de la Division du crime organisé au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).
Dans des propos retranscris par Radio-Canada, il n’a pas caché sa satisfaction : « C’est un gala important pour moi, qui suis issu de la diversité ». C’est mon premier prix gagné dans le cadre de mon travail. Que cette récompense provienne du milieu multiculturel est très significatif pour moi. » Le journaliste a admis que les personnes provenant des communautés culturelles sont encore fortement sous-représentées dans les téléséries, les émissions de variétés et les nouvelles en français, peu importe le réseau de télévision au Québec. Les médias, espère-t-il, « doivent être des leaders dans ce domaine pour que les gens issus de la diversité se reconnaissent à l’écran ».
Pascal Robidas en a profité pour saluer la décision du vice-président aux Services français de Radio-Canada, Michel Bissonnette, qui a décidé de relever le défi en instaurant une culture d’entreprise pour accroître la diversité et l’inclusion dans tous les secteurs de Radio-Canada, y compris la télé et l’information. « Comme minorité visible, je ne peux que saluer cette volonté de la haute direction », a indiqué M. Robidas qui souhaite que le sujet de son reportage sur l’arrivée et l’intégration de réfugiés fasse l’objet de débats à tous les niveaux. « Il n’y a pas de différence entre les “Boat People” du Viétnam dans les années 1970 et les migrants qui traversent la Méditerranée au péril de leur vie. Tous ces gens ont en commun d’avoir vécu la misère et la violence», fait-il remarquer en mettant l’accent sur l’acuité du sujet aujourd’hui encore.
En absence de personnes issues des minorités visibles, ces angles de traitement trouveront moins d’espaces dans les médias. Mais, en fait, les autres secteurs du marché du travail québécois ne sont pas exempts. On y trouve moins d’immigrants qui, pourtant, affichent un niveau de diplomation très élevés par rapport aux natifs.
Selon les statistiques officielles, les immigrants rencontrent beaucoup plus de difficultés à trouver un emploi au Québec qu’ailleurs en Amérique du Nord. De plus, ceux qui arrivent à en décrocher un sont souvent surqualifiés pour le poste. On retrouve facilement des chauffeurs de taxi détenteurs de maîtrise et des titulaires de doctorats dans les centres d’appels, particulièrement à Montréal. Les ordres professionnels, en médecine particulièrement, imposent beaucoup de barrières à la reconnaissance des diplômes des immigrants, ce qui ne facilite pas leur intégration en emploi.
Selon l’étude « Plus diplômés, mais sans emploi », publiée en décembre 2016 par l’Institut du Québec, Montréal occupe la dernière place concernant l’inclusion des immigrants en emploi comparée à 16 autres grandes villes nord-américaines, dont Toronto, Vancouver, Boston et New York. Le taux de chômage des immigrants y était le plus élevé en 2015 : environ 10 % contre 6 % à Toronto et 5 % à Vancouver. L’écart entre le taux de chômage de la population native et celui des immigrants était aussi le plus élevé à Montréal. Tandis que pour la même année, le taux de diplomation universitaire des immigrants montréalais était de 33 %, contre seulement 24 % pour les natifs.
Les immigrants détenteurs d’une licence avaient un taux de chômage de 6,9 %, plus du double de celui des natifs. Avec un diplôme étranger, le taux de chômage était encore plus élevé en 2015: 13 %. Outre la difficulté de faire reconnaître ses compétences, les employeurs montréalais réclament toujours d’un immigrant une expérience de travail québécoise qui constitue un handicap majeur à sa première embauche.
Ces statistiques aident à mieux comprendre le message du journaliste Pascal Robidas. Elles démontrent aussi l’importance de valoriser les réalisations des membres de la diversité culturelle comme le fait Médiamosaïque. C’est donc sans surprise que le travail, Donald Jean, PD-G de l’Agence de presse Médiamosaïque et ancien journaliste à Radio Vision 2000 a été salué par tous les intervenants. Toto Laraque et son ami dominicain Rafael ont animé, avec une joie contagieuse, l’intermède musical. On attend déjà la septième édition !
Source Le Nouvelliste
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