Le gouvernement montre ses crocs, promet de sévir et donne des garanties que le peuple va pouvoir vaquer à ses activités. Vingt-quatre heures après cette promesse, l’étau du « lòk » s’est resserré pendant la journée. Mais pendant la soirée, pour enlever des barricades, des sources indiquent que des agents de la police ont fait parler la poudre à Delmas.
Le Premier ministre démissionnaire, Jean Michel Lapin a annoncé, mardi 29 octobre 2019, à la huitième semaine de « peyi lòk » que « des décisions viennent d’être prises au cour d’une réunion pour assurer la sécurité du pays ». Chaque responsable « va donner des garanties au peuple haïtien pour qu’il puisse vaquer à ses occupations », a poursuivi le numéro 1 du Conseil supérieur de la police nationale (CSPN), entouré du ministre de l’Intérieur, Pierre Josué Agénor Cadet, de celui de la Justice, Jean Roudy Aly, du secrétaire d’Etat à la Sécurité publique, Ronsard St-Cyr et des gradés de la PNH.
Le ministre de l’Intérieur, récemment abonné à la phraséologie des hommes forts, a affirmé « qu’aujourd’hui, l’Etat dit c’en est assez » par rapport aux individus qui pillent, qui cassent, qui attaquent des écoles. « La police, la justice et les autres membres du gouvernement viennent de prendre de grandes décisions pour faire respecter les normes, les principes et la loi », a poursuivi Pierre Josué Agénor Cadet, soulignant qu’en démocratie, l’Etat garantie le droit de manifester et la liberté des citoyens et citoyennes d’exercer leur profession.
« Aujourd’hui, nous disons que la police et la justice ne vont pas tolérer les gens qui font des casses et pillent. Aujourd’hui, la décision est prise de combattre l’impunité jusqu’à la dernière rigueur. C’est la loi qui va être appliquée sans faire d’injustice », a ajouté Pierre Josué Agénor Cadet qui, il y a quelques semaines, fraîchement arrivé à la tête du ministère de l’intérieur avait annoncé que les autorités vont mettre leurs pantalons à leur taille, c’est-à-dire durcir le ton.
Le secrétaire d’Etat à la sécurité, Ronsard St-Cyr a annoncé l’existence d’une équipe composée de plusieurs entités de l’Etat qui travaille à libérer les routes pour permettre la circulation et une disposition concernant les taxis motos, fer de lancer des mouvements protestations depuis le 6, 7 juillet 2018. Il a indiqué que les chauffeurs de taxis seront sanctionnés par la loi s’ils sont appréhendés avec un passager transportant des pierres ou détenant une arme à feu.
Mercredi, 24 heures après les annonces du Premier ministre Jean Michel Lapin et des autres membres du CSPN, l’étau du « peyi lok » s’est encore resserré. Le décor de ville morte est toujours planté. Le commerce formel, informel, le transport en commun et les écoles sont fermés. La circulation dans des axes principaux est quasi inexistante. Dans certains quartiers, à côté des barricades de pneus enflammés, de tréteaux, d’arbres, de pylônes électriques, des poubelles, des barrières en fer forgé sont utilisés.
Ce mercredi et quarante-huit heures avant, ceux qui ont voulu se déplacer l’ont fait à pied, à moto et en voiture dans certains points, comme sur la route de Frères. En certains points de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, comme à Delmas, des coups de feu ont été signalés mardi.
Plus au Sud, mardi aussi, entre le Bicentenaire et Martissant, des témoins ont fait état d’un décor de ville morte et des détonations à l’arme automatique. Plusieurs sources ont indiqué que des membres de la population se sont terrés chez eux pour ne pas faire les frais d’affrontements entre gangs rivaux dont l’un avait menacé de tirer sur tout usager de la route nationale numéro 2, à hauteur de Martissant.
A Petit-Goâve, le mobilier du tribunal de paix, celui du sous-commissariat de police de Borne Soldat, sur la route nationale numéro 2 et un véhicule du bureau de l’Ed’H ont été incendiés par des hommes encagoulés, armés de machettes, de bâtons, ont rapporté des correspondants de presse, mardi 29 octobre 2019.
Ces hommes ont rejoint une manifestation qui a réclamé la démission du président Jovenel Moïse. Les manifestants ont menacé de réduire la ville en cendre si le chef de l’Etat ne laisse pas le pouvoir, a indiqué la correspondante, René Innocente Desgranges. Avant la manifestation, dans l’après-midi, la ville était paralysée. Des barricades étaient érigées sur la route nationale numéro 2.
A St-Marc, dans le Bas-Artibonite, des étudiants ont manifesté aussi pour exiger la démission du président. « Démission sans diversion », a scandé un étudiant interrogé par le correspondant de Kiskeya.
L’interview donnée lundi matin par le président Jovenel Moïse à radio Métropole n’a pas calmé les esprits tout comme le point de presse du Premier ministre Jean Michel Lapin qui est intervenu alors que les Américains encouragent le dialogue afin de doter au pays d’un gouvernement fonctionnel.
Le journal a appris que d’autres entités qui discutent sur l’organisation de la transition politique n’ont pas encore trouvé un consensus sur l’après Jovenel Moïse. Entre-temps, les jours se suivent et se ressemblent presque.
Source Le Nouvelliste
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